Le site arthur.bebou.netlib.re - retour accueil
git clone git://bebou.netlib.re/arthur.bebou
Log | Files | Refs |
commit 2e57d700fa4308c6f3cd9e5a5a6fcc673ce8cf54 parent 4d0997b1c9055b712c22382f81b77c6be4cd356d Auterice: Arthur Pons <arthur.pons@unistra.fr> Date: Thu, 10 Oct 2024 22:48:13 +0200 Première relecture article calais Diffstat:
M | contents/calais-passage/index.sh | | | 386 | ++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++------------------------------------- |
1 file changed, 206 insertions(+), 180 deletions(-)
diff --git a/contents/calais-passage/index.sh b/contents/calais-passage/index.sh @@ -8,7 +8,7 @@ fig() { legend=$(< ~/git/smallboats/plan sed -n "$1p") <<. save_html main <figure> - <img loading="lazy" src="/calais-passage/fig$1.png" alt="$legend" /> + <img loading="lazy" src="/calais-passage/fig$1.avif" alt="$legend" /> <figcaption> figure $1 : $legend<br> <a href="/calais-passage/fig$1.tsv">données</a> - @@ -20,7 +20,11 @@ legend=$(< ~/git/smallboats/plan sed -n "$1p") section: main -Article non relu +Article vaguement relu + +Les images sont au format avif pour éviter de trop alourdir l'article. Si vous +ne pouvez pas les visualiser prévenez moi, je peux vous envoyer les versions +png. ## Avant propos @@ -53,33 +57,46 @@ dangereuse, la traversée de la manche est rendue d'autant plus compliquée par les patrouilles sur les plages qui vont jusqu'à gazer les personnes tentant d'embarquer sur les bateaux et les percer à coup de canifs. -Il résulte des ces violences, et de nombreuses autres, que le littoral nord est +Il résulte de ces violences, et de nombreuses autres, que le littoral nord est un lieu dangereux pour les personnes exilées. Dangereux pour leur santé, physique et mentale, au point d'en mourir. C'est ainsi qu'[au moins 446 personnes sont mortes du fait de la frontière](https://lesjours.fr/obsessions/calais-migrants-morts/ep1-memorial/). Que ce soit en volant des tentes ou par la militarisation de la frontière, la -violence étatique n'a très manifestement rien résolu au problème de Calais, -Grande-Synthe, Boulogne et Dunkerque. C'est parce que celui qu'elle cible -n'existe pas : la "crise migratoire", qui se caractériserait pas la simple -existence de ces personnes à cet endroit. Le fantasme d'une frontière vidée de -ses exilées ne sera pas assouvi, certainement pas en multipliant les opérations -militaires. Les militant·es à la frontière ont pour habitude de dire que fasse à -l'évidence de l'exil le problème de la frontière est en réalité celui de -l'accueil et sa solution plus de solidarité. +violence étatique n'a rien résolu au problème de Calais, Grande-Synthe, Boulogne +et Dunkerque. C'est parce que le problème qu'elle cible, la "crise +migratoire", n'existe pas vraiment. Le fantasme d'une frontière vidée de ses +exilées ne sera pas assouvi, certainement pas en multipliant les opérations +policières. Les militant·es à la frontière ont pour habitude de dire que face à +l'évidence de l'exil le problème qui existe bel et bien est en réalité celui de +l'accueil, et sa solution : plus de solidarité. Pour résoudre le sujet qui va nous occuper dans cet article, à savoir la dangerosité du passage par bateau, les revendications sont nombreuses. Bien que l'abolition pure et simple des frontières puisse être la plus radicale et -efficace on pourrait imaginer permettre aux personnes exilées de prendre l'un -des très nombreux ferrys traversant quotidiennement la manche, via un circuit -dédié s'il le faut. Cela ne changerait pas grand chose à la quantité de -passage[^2] mais ferait disparaître les morts. +efficace on pourrait plus modestement imaginer permettre aux personnes exilées +de prendre l'un des très nombreux ferrys traversant quotidiennement la manche. +Cela ne changerait pas grand chose à la quantité de passage[^2] mais ferait +disparaître les morts. + +Aussi ça coûterait diablement moins cher que de surveiller la côte. A raison de +[100€ par +billet](https://www.poferries.com/fr/nos-itin%C3%A9raires/calais-%C3%A0-douvres#route), +que l'on double pour diverses dépenses, faire passer les 140 000 personnes +depuis 2018 aurait coûté 28 000 000€ sur 6 ans, bien loin des [plus de 100M€ +dépensés entre 2015 et +2018](https://www.ouest-france.fr/europe/royaume-uni/calais-londres-va-augmenter-de-50-5-millions-d-euros-sa-contribution-5508227) +ou des [541M€ (!!!) sur trois ans promis début +2023](https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/pas-calais/calais/traversees-de-la-manche-londres-investit-541-millions-d-euros-pour-securiser-la-frontiere-2730574.html). +La situation à Calais est tellement absurde et la solution de payer les ferrys +tellement évidente que [même Xavier Bertrand est +pour](https://twitter.com/xavierbertrand/status/1464907872794517505?ref_src=twsrc%5Etfw) +! ### Pourquoi dire "personnes exilées" ? -Dans cet article j'utiliserai le terme "exilées" pour désignées les personnes +Dans cet article j'utiliserai le terme "exilées" pour désigner les personnes ayant quitté leurs lieux de vies afin de rejoindre le Royaume-Uni. J'emprunte la justification à Jérôme Valluy, enseignant-chercheur à Paris 1, dans son livre "Rejet des exilés" : @@ -96,7 +113,7 @@ justification à Jérôme Valluy, enseignant-chercheur à Paris 1, dans son livr > définitivement ou temporairement. » 1) et oriente vers l’étude des > conditions d’accueil notamment sous l’angle des représentations sociales et > des politiques publiques qui se rapportent aux exilés. -> +> > La notion d’exil implique l’idée d’une contrainte à partir, et elle la > conserve même pour l’exil volontaire : elle laisse entendre que le départ du > pays a été forcé, au moins dans une certaine mesure, mais sans que cela ne @@ -127,66 +144,62 @@ justification à Jérôme Valluy, enseignant-chercheur à Paris 1, dans son livr ### Les données -Une fois n'est pas coutume, je ne vais pas rentrer dans les détails de comment -j'ai obtenu ces données. +Une fois n'est pas coutume, je ne détaillerai comment j'ai obtenu ces données. -Les données des passages en bateau sont disponibles directement sur le site du -gouvernement britannique. Il existe [une page récapitulant les sept derniers -jours](https://www.gov.uk/government/publications/migrants-detected-crossing-the-english-channel-in-small-boats/migrants-detected-crossing-the-english-channel-in-small-boats-last-7-days) -mais j'utilise [ce tableur ods contenant toutes les données depuis + * Les données des passages en bateau fournies par le gouvernement britannique : [ce tableur ods contenant toutes les données depuis 2018](https://assets.publishing.service.gov.uk/media/66ffef71c71e42688b65f18d/03_Oct_2024_Small_boats_-_time_series.ods). + * Les données de vent sont scrapées depuis : https://weatherspark.com. -Pour les données de vent je scrap les pages de https://weatherspark.com. +Résultat : -Tout est disponible dans le dépôt git -http://git.bebou.netlib.re/calais-data/log.html. + * tsv complet : http://arthur.bebou.netlib.re/calais-passage/full.tsv + * dépôt git permettant de produire le TSV et les figures de cet article : + http://git.bebou.netlib.re/calais-data/log.html. -Le TSV complet sous le format ci-dessous : -http://arthur.bebou.netlib.re/calais-passage/full.tsv +Le TSV est sous le format suivant : date arrivals boats people-per-boat average-wind-speed 2024/06/30 345 7 49.286 7.55246372 ### Les limites de l'article -Je ne suis pas statisticien. Sans jamais en avoir réellement fait l'expérience -j'ai toujours entendu, et je crois au fait, qu'il est très simple de faire des -bêtises en faisant des stats. Il est possible que ce qui suit en soit un +Je ne suis pas statisticien. Sans jamais en avoir fait l'expérience j'ai +toujours entendu, et je crois au fait, qu'il est très simple de faire des +bêtises en faisant des stats. Il est possible que ce qui suit en soit un bel exemple. -Toute analyse statistique n'est qu'aussi pertinente que la qualité de ses +Une analyse statistique ne peut qu'être aussi pertinente que la qualité de ses données. En l'occurrence les données du gouvernement britannique sont réputés fiables mais les statistiques de vitesse de vent sont des moyennes sur une journée entière à Calais même. Non seulement la vitesse du vent peut fortement varier d'un moment à l'autre mais cela fait des années que les départs en bateau -ne sont plus depuis Calais mais sur les plages en allant vers Boulogne ou +ne se font plus depuis Calais mais depuis les plages en allant vers Boulogne ou Grande-Synthe. Aussi, ce qui détermine réellement s'il y passage ou pas est -l'organisation des réseaux de passage. La vitesse du vent n'est en quelque sorte -qu'un proxy pour savoir si les passeurs vont organiser une tentative (un try on -dit à Calais) ce jour là. Il est tout à fait possible qu'un jour sans vent ne -voit personne passer parce que, pour d'autres raisons, les passeurs n'ont pas -prévu de passage ce jour là. A l'inverse les passeurs, pas connus pour avoir la -sécurité de leurs client·es en première préoccupation, peuvent très bien -organiser un passage un jour de vent modéré. Du moins tant qu'il existe des -personnes assez courageuses/désespérées pour tenter le coup. En résumé si -l'étude de la corrélation entre le vent et les passages devrait tout même -permettre de faire émerger les corrélations les plus grossières il ne faudra pas -en déduire plus. +l'organisation des réseaux de passage. La vitesse du vent n'est qu'un proxy pour +savoir si les passeurs vont organiser une tentative[^7] ce jour là. Il est tout +à fait possible que personne ne passe un jour sans vent parce que, pour d'autres +raisons, les passeurs n'ont pas prévu de passage ce jour là. A l'inverse les +passeurs, pas connus pour se préoccuper de la sécurité de leurs client·es, +peuvent très bien organiser un passage un jour de vent modéré. Du moins tant +qu'il existe des personnes assez courageuses/désespérées pour tenter le coup. En +résumé si l'étude de la corrélation entre le vent et les passages devrait tout +de même permettre de faire émerger les corrélations les plus grossières, il ne +faudra pas en déduire plus. J'ai déjà entendu à plusieurs reprises que la mise en statistique d'évènements réels, à fortiori quand cela implique des histoires humaines parfois tragiques, permettrait de (voir serait né pour ?) gouverner, souvent avec un tropisme libéral et autoritaire. Bien que cette théorie me soit assez étrangère[^3] -je reste sensible à l'idée de ne pas résumer un fait humain à sa part +je souhaite rester sensible à l'idée de ne pas résumer un fait humain à sa part quantifiable. C'est en étant d'abord en contact avec des personnes là-bas que j'ai eu pour idée d'explorer ce jeu de donnée pour mieux informer ce qu'elles savent être vrai sans nécessairement l'avoir mesuré. -Finalement ce qui me pousse à écrire cet article est très personnel et à cet -égard limité. J'ai envie de : +Finalement ce qui me pousse à écrire cet article est très personnel. J'ai envie +de : * m'entrainer à l'usage d'outils que je perçois utiles pour faire de la - science ouverte et reproductive dans un contexte moins formel que celui de + science ouverte et reproductible dans un contexte moins formel que celui de l'écriture d'un papier. * parler de Calais aux personnes qui seraient susceptibles d'être elles même intéressées par ces outils. @@ -206,30 +219,25 @@ endsection fig 1 section: main -Je sais pas encore bien gérer les dates dans gnuplot, désolé pour l'abscisse un -peu étrange. En gros, à `x=1000` on est le millième jour après le 1er janvier -2018, il y a un point correspondant qui se trouve à la hauteur de la vitesse -moyenne du vent ce jour là. Chaque point est un jour, s'il semble y avoir -plusieurs points ayant la même abscisse c'est une illusion, ils sont simplement -très proches. - -On apprend plusieurs choses avec ce graph. Premièrement les passages en bateau -n'ont commencé à être fréquents qu'autour de 2019 et très fréquents vers 2020. -Ils semblent légèrement se regrouper périodiquement, autour de 800, 1250, 1700 -etc). Deuxièmement les jours de très forts vents sont relativement périodiques, -(vers ~360, ~730, ~1150 etc). Cela correspond plus ou moins aux étés et hivers. -Mais nous ne sommes pas là pour faire la météo. - -Il semblerait que les points violets, c'est à dire les jours avec passage, sont -effectivement plus fréquents plus l'on descend en ordonnées. Il reste beaucoup -de jours sans passages autour de vitesse de vent de 6/7. Par contre presque -aucun jour avec passage n'a eu une vitesse de vent moyenne supérieur à 10. -On peut donc émettre une hypothèse que le proverbe serait encore plus vrai si -l'on prenait son inverse, à savoir +Chaque point est un jour, s'il semble y avoir plusieurs points ayant la même +abscisse c'est une illusion, ils sont simplement très proches. + +On apprend plusieurs choses avec ce graph. Premièrement les passages en bateaux +n'ont commencé à être fréquents qu'autour de 2019 et très fréquents à l'été +2020. Ils semblent légèrement se regrouper périodiquement, du milieu de l'année. +Deuxièmement les jours de très forts vents sont relativement périodiques, vers +la fin de l'hiver. Mais nous ne sommes pas là pour parler météo. + +Il semblerait que plus l'on descend en ordonnées plus les points bleus sont +fréquents ce qui indiquerait que moins il y a de vent plus il y a de passage. +Cela dit il reste beaucoup de jours sans passages autour de vitesse de vent de +6/7. Par contre presque aucun jour avec passage n'a eu une vitesse de vent +moyenne supérieur à 10. On peut donc émettre l'hypothèse que le proverbe +serait encore plus juste s'il disait : > Ah il vente beaucoup aujourd'hui, il n'y aura pas de passage ! -Vérifions tout de même ce qu'il en est pour les jours de passage. Pour cela nous +Vérifions tout de même ce qu'il en est numériquement. Pour cela nous pouvons regarder, pour chaque vitesse de vent moyenne, le rapport entre le nombre de jours avec passage et celui sans passage. @@ -242,11 +250,11 @@ majorité du temps ! La tendance s'inverse drastiquement passé 6 et les jours avec passage disparaissent presque complètement passé 12. Cela confirme notre intuition : des vents faibles sont une condition presque nécessaire au passage mais pas suffisante. La corolaire est que des vents forts sont quasi -rédhibitoire pour le passage. +rédhibitoires pour le passage. -Cela dit ce graph ne montre que les jours avec et sans passages, quand est-il de -du nombre de personnes concernées. Se pourrait il que, si beaucoup de jours avec -des vents très faibles sont des jours de passage, ils soient des jours de +Cela dit ce graph ne montre que les jours avec et sans passages, qu'en est-il de +du nombre de personnes concernées ? Se pourrait il que, si beaucoup de jours +avec des vents très faibles sont des jours de passage, ils soient des jours de "faible" passage ? Pour cela regardons le nombre de personnes passées par vitesse de vent : @@ -254,17 +262,17 @@ endsection fig 3 section: main -Il semblerait que non, les données sont relativement cohérentes avec le graph -précédent. En plissant les yeux un peu on pourrait peut-être même déceler que la -quantité de personnes qui passe est légèrement disproportionnée en faveur des -jours avec faible vent au regard du nombre de jours concernés.Si c'est le cas -c'est léger et je n'ai pas pris le temps de mieux regarder. +Il semblerait que non, les données sont cohérentes avec la figure précédente. +En plissant les yeux on pourrait presque déceler que la quantité de personnes +qui passe est légèrement disproportionnée en faveur des jours avec faible vent +au regard du nombre de jours concernés.Si c'est le cas c'est léger et je n'ai +pas pris le temps de mieux regarder. ## D'autres données -### Quand est-ce que les personnes passent +### Quand est-ce que les personnes passent ? -Dans la première figure nous pouvions deviner qu'il y avait des cluster et des +Dans la première figure nous pouvions deviner qu'il y avait des clusters et des creux de passage. Nous pouvions aussi deviner que cela correspond à l'été et l'hiver. Regardons de plus près : @@ -272,38 +280,35 @@ endsection fig 4 section: main -On constate qu'effectivement, il semble y avoir des sortes de grandes gerbes -d'eau du type vague qui s'écrase sur un rocher de manière périodique. Cela dit -il est difficile de lire un nuage de point comme celui-ci pour dégager une -répartition. Pour remédier à cela on peut créer des sortes de "seaux" pour -lesquels on regroupe et on fait la somme de tous les points qui sont dedans. -Par exemple, en prenant une taille d'une semaine : +On dirait des vagues qui s'écrasent sur un rocher. On croit deviner une +périodicité mais il est difficile de lire un nuage de point comme celui-ci pour +en dégager une répartition. Pour remédier à cela on peut créer des sortes de +"seaux" pour lesquels on regroupe des points dont on fait la somme. Par +exemple, en prenant une taille d'une semaine : endsection fig 5 section: main -Les pics semblent se dégager mais les données restent assez chaotiques avec des -semaines sans passage au milieu de moment d'activités intense. Prenons donc des -seaux d'une taille d'un mois (visualisés ci-dessus par les traits verticaux en pointillés) : +Nos vagues deviennent des pics de glace mais les données restent assez +chaotiques avec des semaines sans passage au milieu de moment d'activités +intense. Prenons donc des seaux d'une taille d'un mois (visualisés ci-dessus par +les traits verticaux en pointillés) : endsection fig 6 section: main On voit dorénavant très clairement qu'il y a systématiquement quelques mois bien -en dessous de la moyenne autour des graduations des abscisses. Or le premier -mois étant celui de janvier 2018 et les graduations étant sur une période de 12 -mois, elles correspondent au mois de janvier de chaque nouvelle années. On en -conclu donc qu'il y a moins de passage chaque hiver et, à l'inverse, plus de -passage fin de l'été. - -Cette technique de regrouper les données pour dégager une tendance est le b.a.ba -de l'analyse statistique mais on constate dans cet exemple qu'elle a comme -désavantage de masquer les détails[^4]. Visualiser les données à différente -échelle nous permet ici de voir la nature saisonnière du passage mais également -de garder à l'esprit que même lors des mois les plus intense il y a des jours -voir des semaines entières sans passage. +en dessous de la moyenne autour de la nouvelle année et bien au dessus entre. +On en conclu que le passage est effectivement saisonnier. + +Regrouper les données pour dégager une tendance est le b.a.ba de l'analyse +statistique mais cet exemple démontre que cela a le désavantage de masquer les +détails[^4]. Visualiser les données à différentes échelles nous permet ici de +voir la nature saisonnière du passage mais aussi de garder à l'esprit que +même lors des mois les plus intenses il y a des jours voir des semaines entières +sans passage. On peut terminer cette analyse de la quantité de passage en fonction du temps en regardant par année, par mois de l'année et par jour de la semaine : @@ -312,50 +317,40 @@ endsection fig 7 section: main -Le premier graph ne nous apprend que le passage par bateau est assez récent et a -explosé en 2021. 2022 est l'année celle ayant vu le plus de passage et de très -loin. Je ne sais pas pourquoi, il faudrait demander à des personnes sur le -terrain. Le second confirme ce que l'on savait sur le passage saisonnier. Le -troisième n'est pas très éclairant à part peut-être la différence entre les -vendredi et les samedi qui n'est peut-être pas due au hasard. Idem, à par -connaître le terrain nous ne pourrons pas en savoir plus avec ces données. A -moins que l'on découvre que le vent souffle plus fort les vendredi. +Le premier graph nous apprend que le passage par bateau est assez récent et a , +en absolu, explosé en 2021. 2022 est l'année ayant vu le plus de passage et de +très loin. Je ne sais pas pourquoi, il faudrait demander à des personnes sur le +terrain. Le second confirme ce que l'on savait sur le passage saisonnier avec la +fin de l'été ayant la plus forte activité. Le troisième n'est pas très éclairant +à part la différence entre les vendredi et les samedi qui n'est peut-être pas +due au hasard. Idem, à par connaître le terrain nous ne pourrons pas en savoir +plus avec ces données. A moins que l'on découvre que le vent souffle plus fort +les vendredi. ### Le nombre de personnes par bateaux Une autre affirmation que l'on entend souvent à Calais est qu'il y a de plus en -plus de monde sur les bateaux avec le temps. Cela est dans l'intérêt des -passeurs qui ainsi rentabilisent encore davantage chaque traversées.Ce fait -souvent tenu responsable pour les naufrages et morts par écrasement lors des -traversés. Voyons donc à quel point le problème est marqué en traçant les points -du nombre moyen de personnes sur les bateaux pour chaque jours lors duquel il y -a eu passage. Par la même occasion regardons la répartition des ces nombres par -années en traçant des diagrammes à moustache : +plus de monde sur les bateaux. Ce fait est souvent tenu +responsable des naufrages et morts par écrasement lors des traversés. Voyons +donc à quel point le problème est marqué en traçant le nombre moyen de personnes +par bateaux pour chaque jour de passage. Par la même occasion regardons la +répartition de ces nombres par année en traçant des diagrammes à moustache : endsection fig 8 section: main Le premier graphe est saisissant, il y a une corrélation nette entre le temps et -le nombre de personnes par bateau. Là où les bateaux contenaient autour de 10 -personnes lors des 200 premiers jours de passage, ils en contienne de plus en -plus ensuite pour aller jusqu'à 70 personnes aujourd'hui. +le nombre de personnes par bateau. Il était rare de trouver plus de 20 +personnes par bateaux jusqu'en 2021, il est dorénavant fréquent d'en trouver +plus de 50. Ces chiffres peuvent s'interpréter de deux manières qui ne sont pas mutuellement exclusives : * soit les bateaux sont plus grands et permettent à plus de monde d'y monter - * soit les passeurs préviennent davantage de monde par bateau prévu et la - densité des bateaux augmentent - -En se basant uniquement sur les données présentes ici on peut conclure qu'il y a -de plus en plus de personnes sur les bateaux mais pas que la densité des bateaux -augmentent. Cela dit les récits des personnes exilées à Calais sur ces -dernières années et la hausse des naufrages semblent coïncider avec le nombre -croissant de personne par bateau. Il est donc très probable que la densité -augmente et ce peu importe si des bateaux plus grands sont utilisés. Pour -abonder en ce sens on pourrait tenter de corréler les morts par écrasement et -naufrage avec le nombre de personnes par bateau. + * soit les passeurs préviennent davantage de monde par bateau et la densité + des bateaux augmente Le second graph montre la même évolution en rendant plus clair le fait que pour l'instant[^5] 2024 s'annonce comme étant l'année avec le plus de personnes par @@ -364,12 +359,39 @@ autant par rapport à 2023 mais que les bateaux les plus remplis le sont encore davantage. En d'autre termes il y a une plus grande dispersion dans la quantité de personne par bateau. On note ce qui semble être une rupture entre 2020 et 2021 où l'on passe de valeurs plutôt regroupées à une dispersion plus grande. -On peut faire plusieurs hypothèses pour l'expliquer : +On peut faire plusieurs hypothèses que l'on ne pourra pas vérifier : - * Les passeurs ont soudainement changé de stratégie en mettant de plus en plus + * les passeurs ont soudainement changé de stratégie en mettant de plus en plus de personnes par bateau - * Un nouveau type de bateau plus grand a commencé à être utilisé - * Les deux en même temps + * un nouveau type de bateau plus grand a commencé à être utilisé + * les deux en même temps + +Les données que l'on possède ne nous permettent pas d'en savoir plus à ce sujet. +En regardant du côté du terrain les récits des personnes exilées à Calais sur +ces dernières années suggèrent que la densité augmente. Pour abonder en ce sens +on pourrait tenter de corréler les morts par écrasement et naufrage avec le +nombre de personnes par bateau. + +Sans pouvoir le démontrer voici mon scénario fantaisiste : + +De 2018 à fin 2020 des modèles similaires de bateaux très petits auraient été +utilisés limitant ainsi l'augmentation du nombre de personne. Avec l'explosion +de la demande en 2021 les passeurs auraient commencé à acheter des bateaux plus +grands tout en continuant à utiliser quelques anciens bateaux en stock. Cela +expliquerait le saut vers le haut mais aussi l'étendu beaucoup plus grande avec +les petits passages encore relativement nombreux. A partir de 2022 les passeurs +n'utiliseraient presque plus le type d'embarcations utilisés de 2018 à 2020 et +auraient entrepris de bourrer au maximum les nouveaux bateaux pour faire face au +pic de demande comme démontré [ici](/calais-passage/#le-vent-le-retour). En +2024, toujours avec le même type de bateau l'augmentation du nombre de personne +par bateau est obligée de ralentir mais perdure puisqu'avantageuse pour le +portefeuille des passeurs notamment lors de l'été. + +Je pense que je frôle l'écriture d'invention la plus totale et ce que [j'ai +décrit plus tôt](/calais-passage/#les-limites-de-larticle). + +On pourrait ici regarder la saisonnalité de la densité des bateaux. A vu d'oeil +la moyenne est plus basse en hiver mais l'étendue beaucoup plus grande l'été. ### Le vent, le retour @@ -383,8 +405,9 @@ section: main Il semblerait bien que non. Je ne décèle aucune tendance particulière. Par ailleurs la figure 1 nous montre que la vitesse moyenne du vent est stable année -après année. Cela est cohérent avec l'analyse suivante. Face à une demande -croissante pour le passage les passeurs ont deux solutions : +après année. Cela est cohérent avec l'analyse suivante. + +Face à une demande croissante les passeurs ont deux solutions : 1. augmenter le nombre de jours de passages 2. faire passer plus de monde les jours de passage @@ -396,43 +419,46 @@ endsection fig 10 section: main -De 2018 à 2019 le nombre de personnes qui passent fait plus que tripler, la -nombre de jours avec passage triple, le nombre de bateaux triple, la quantité de -personne par bateau prend 50%. La demande supplémentaire a été encaissé en -jouant sur toutes les variables. -De 2019 à 2020 le nombre de personne est multiplié par quatre, le nombre de -jours augmente d'environ 66% et la quantité de personne par bateau de 20%. Ces -augmentations ne semblent pas pouvoir expliquer à elles seules le quadruplage. -En effet c'est surtout le le nombre de bateaux par jour de passage qui explose -et permet d'encaisser les passages supplémentaires. -De 2020 à 2021 le nombre de personne triple mais le nombre de jour n'augmente -que de 20%, c'est à nouveau la quantité de bateaux et la densité qui jouent le -plus. -De 2021 à 2022 le nombre de personne continue d'augmenter mais le nombre de -jours de passage reste d'autant plus stable. C'est donc encore la solution 2 qui -est à l'œuvre avec cette fois-ci la densité encaissant la majorité de -l'augmentation. -De 2022 à 2023 le passage redescend à son niveau de 2021 et le nombre de jours -également. Pourtant on retrouve environ le même nombre de bateaux qu'en 2020 -alors qu'il y avait presque quatre fois moins de personnes à faire passer ! -C'est la densité, qui elle continue à croitre, qui permettra de compenser le -jours et les bateaux en moins. + 1. De 2018 à 2019 le nombre de personnes qui passent fait plus que tripler, la + nombre de jours avec passage triple, le nombre de bateaux triple, la + quantité de personnes par bateau prend 50%. La demande supplémentaire a été + encaissée en jouant sur toutes les variables. + 2. De 2019 à 2020 le nombre de personne est multiplié par quatre, le nombre de + jours augmente d'environ 66% et la quantité de personne par bateau de 20%. + Ces augmentations ne semblent pas pouvoir expliquer à elles seules le + quadruplage. En effet c'est surtout le nombre de bateaux par jour de + passage qui explose et encaisse les passages supplémentaires. + 3. De 2020 à 2021 le nombre de personne triple mais le nombre de jour + n'augmente que de 20%. Les passeurs approchent certainement la limite du + nombres de jours durant lesquels ils peuvent organiser des passages en + tenant compte du vent, de la police etc. C'est à nouveau la quantité de + bateaux et la densité qui jouent le plus. + 4. De 2021 à 2022 le nombre de personne continue d'augmenter mais le nombre de + jours de passage reste plus stable. C'est donc encore la solution 2 qui est + à l'œuvre avec cette fois-ci la densité encaissant la majorité de + l'augmentation. + 5. De 2022 à 2023 le passage redescend à son niveau de 2021 et le nombre de + jours également. Pourtant on retrouve environ le même nombre de bateaux + qu'en 2020 alors que presque quatre fois moins de personnes sont passées ! + C'est la densité, qui elle continue à croitre, qui permettra de compenser + le jours et les bateaux en moins. + Il semble que le scénario soit parti pour être le même entre 2023 et 2024 avec à -peu près autant de personne pour un peu moins de bateaux et de jours et donc une +peu près autant de personnes pour un peu moins de bateaux et de jours et donc une densité toujours plus grande. -Sachant tout cela et compte tenu du fait qu'il y a sur une année depuis 2018 à -peu près autant de personnes qui partent de Calais que de personnes qui y -arrivent on déduit que c'est principalement en faisant passer plus de personnes -par jour que les passeurs arrivent à répondre à la demande, en particulier -depuis 2021. Il n'est donc aujourd'hui pas nécessaire de tenter des traversées -plus dangereuses avec plus de vent. Si à l'avenir la quantité de personnes -souhaitant passer venait à exploser et/ou si elles parvenaient je ne sais pas -trop comment à faire pression sur les passeurs pour que les bateaux soient moins +Sachant tout cela et compte tenu du fait qu'il y a depuis 2018 à peu près autant +de personnes qui partent de Calais que de personnes qui y arrivent on déduit que +c'est principalement en faisant passer plus de personnes par jour que les +passeurs arrivent à répondre à la demande, en particulier depuis 2021. Il ne +leur est donc aujourd'hui pas nécessaire d'organiser des traversées plus +dangereuses avec plus de vent. Si à l'avenir la quantité de personnes souhaitant +passer venait à réaugmenter et/ou si elles parvenaient je ne sais pas trop +comment à faire pression sur les passeurs pour que les bateaux soient moins denses alors on peut imaginer que la vitesse moyenne du vent lors des jours de passage augmenterait. -Tout cela n'explique pas vraiment *pourquoi* c'est le nombre de bateau et leur +Tout cela n'explique pas vraiment *pourquoi* c'est le nombre de bateaux et leur densité qui ont été privilégiés à partir de 2021 pour gérer la demande. Il faudrait en savoir plus sur l'organisation des réseaux de passage et leurs rapports avec les personnes exilées. On peut imaginer que : @@ -445,10 +471,10 @@ rapports avec les personnes exilées. On peut imaginer que : * qu'il soit logistiquement beaucoup plus simple de lancer 15 bateaux en un jour qu'un bateau par jour pendant 15 jours. L'impossibilité pour la police de surveiller n plages en même temps et arrêter les 15 bateaux en simultanée - est à prendre en compte ici. + est à prendre en compte. * que d'une manière ou d'une autre *la* police ou des agents de police soient - vaguement de mèche avec les réseaux de passage et s'arrangent pour laisser - beaucoup de bateaux sur certains jours *(conspi conspiii)*. + de mèche avec les réseaux de passage et s'arrangent pour laisser beaucoup de + bateaux sur certains jours *(conspi conspiii)*. ## Quelle suite ? @@ -462,26 +488,26 @@ le temps je reviendrai sur cet article pour les ajouter. Notamment : statistique, agrégée par semaine, à l'état britannique qui la publie dans le tableau mis à disposition sur leur site. Je ne m'y suis pas encore intéressé du fait du faible nombre de points de données. + * le lien entre densité des bateaux et saisons. [^1]: dont le plus connu était "la grande jungle" détruite en 2016. Depuis les - personnes exilées n'ont pas disparu de Calais, elles vivent simplement de - manière plus éclatées, moins visible et généralement dans des conditions - plus difficile qu'auparavant. + personnes exilées n'ont pas disparu de Calais, elles vivent de manière plus + éclatées, moins visible et généralement dans des conditions plus difficiles + qu'auparavant. [^2]: au vu de la difficulté du périple jusque là, notamment pour les soudanais nombreux à Calais, le confort du passage n'est vraisemblablement pas une variable déterminante. Les personnes arrivant à Calais pour traverser la - manche sont motivées par l'idée d'aller vivre spécifiquement au Royaume-Uni, - à l'inverse il est très peu probable que les personnes s'étant installées + manche sont motivées par l'idée d'aller vivre spécifiquement au Royaume-Uni. + À l'inverse il est très peu probable que les personnes s'étant installées ailleurs y aillent soudainement parce que la traversée est plus facile. [^3]: je serais d'ailleurs incapable de nommer les sources que j'ai pu lire à ce sujet -[^4]: ce qui est aussi ce pourquoi elle est utile +[^4]: ce qui est aussi ce pourquoi c'est utile [^5]: les données ne vont que jusqu'à fin septembre 2024 [^6]: tout est relatif, je ne cautionne pas le travail des passeurs qui abusent des personnes exilées. Comme discuté au début de l'article ce qui paraît "raisonnable" pour une personne exilées prête à presque tout pour franchir ne l'est peut-être pas pour nous. Les personnes exilées savent qu'elles - peuvent mourir mais, comme en témoignent les chiffres en méditerranée, il - faudrait qu'une part très significative des traversées soient mortelles - pour dissuader assez de monde et que cela se voit sur les stats. Et - encore... + peuvent mourir mais, comme en témoignent les chiffres en méditerranée, cela + ne dissuade pas la plupart de tenter leur chance. +[^7]: un try comme on dit à Calais